Nez de Cléopâtre

Portrait peint de Cléopâtre VII avec des cheveux roux et ses traits faciaux distincts, portant un diadème royal et des épingles à cheveux perlées, Herculanum, milieu du Ier siècle, musée archéologique national de Naples.

Le nez de Cléopâtre est une expression utilisée pour faire référence à une célèbre formule inventée par Blaise Pascal dans son ouvrage Pensées dans un contexte de démonstration mathématique. Il y soutient que de bien petits effets peuvent avoir de grandes conséquences, et faisant référence aux amours de la reine Cléopâtre VII, imagine qu'avec un physique différent, un nez plus court, elle n'aurait pas séduit Jules César et Marc Antoine[1]. La citation de Pascal est « Qui voudra connaître à plein la vanité de l'homme n'a qu'à considérer les causes et les effets de l'amour. [...] Le nez de Cléopâtre, s'il eût été plus court, toute la face de la terre aurait changé »[2],[3].

Pascal a peut-être été inspiré par la tragédie de Shakespeare Antoine et Cléopâtre qui contribue au mythe de la femme fatale qui se voit impliquée dans des relations passionnées vouées à la tragédie[4].

Linguistique de la citation

Outre l'opposition face (visage) de Cléopâtre / face de la terre, la citation utilise une anacoluthe. L'antéposition (ou prolepse) apporte une suspension qui retient l'attention et met l'esprit en attente[5]. Selon Patrick Bacry, « l'anacoluthe est si proche de la prolepse que la différence entre les deux figures est fort ténue »[6].

En réalité

Monnaie à l'effigie de Cléopâtre, avec au revers un aigle tenant un éclair et l'inscription ΒΑΣΙΛΙΣΣΗΣ ΚΛΕΟΠΑΤΡΑΣ / Basilissēs Kleopatras.

Les rares images du profil de Cléopâtre semblent indiquer qu'elle avait un nez plutôt proéminent. La vérité historique dément assez facilement que le charme de la reine ne dépendait pas de son nez mais bel et bien de sa personnalité[7].

Postérité

À la suite de cette citation de Pascal, le nez de Cléopâtre est devenu dans la culture un élément constitutif de la personnalité de la reine, par exemple dans une étude historique du monde intitulée : La physique met le nez dans la défaite de Cléopâtre[8].

Au cinéma

  • Le Nez de Cléopâtre, court métrage coréalisé par Paula Delsol et Jean Malige en 1957

Dans la littérature

  • Le Nez de Cléopâtre, Denoël, coll. « Présences » no 14, 1994 (ISBN 2-207-24191-2); en 2000, Denoël, coll. « Présence du futur » no 621 (ISBN 2-207-25001-6); en 2001, Gallimard, coll. « Folio SF » no 70 (ISBN 2-07-042076-0)[9]
  • Du nez de Cléopâtre à la rétine de Galilée : le fabuleux voyage d'un atome de carbone[10] (2021, Editions Baudelaire).
  • Le nez de Cléopâtre est régulièrement évoqué dans la bande dessinée Astérix et Cléopâtre (1963), de René Goscinny et Albert Uderzo.

En musique

  • Le nez de Cléopâtre, chanson de Ray Ventura et son orchestre en 1938.

Notes et références

  1. « Si le nez de Cléopâtre eût été plus court, toute la face du monde aurait changé », sur lepoint.fr
  2. On trouve cette pensée sous sa forme complète dans l'édition de 1871 numérisée dans Wikisources : Blaise Pascal, Œuvres complètes, tome I : Pensées, Hachette, (lire en ligne), Article VI, pp. 273 à 284, pensée n° 46, p. 281, et dont le fac-similé se trouve ici : « Œuvres complètes de Blaise Pascal, page 281 », sur Wikisources (consulté le ), pensée n° 46.
  3. Marcel Conche, « XXVII. Si le nez de Cléopâtre », dans : Avec des « si », Journal étrange, sous la direction de Marcel Conche, Paris, Presses Universitaires de France, « Perspectives critiques », 2006, p. 115-117, lire en ligne
  4. Christiane Ziegler, Cléopâtre: le mythe, Paris, Somogy éditions d'art, , p.26
  5. L'exemple a été présenté comme une phrase complète. Pascal a multiplié des notes éparses, non destinées à être publiées en l'état. Les éditeurs ont donc chacun livré les Pensées avec la ponctuation qu'ils jugeaient la plus adaptée. Ainsi, l'édition de la Pléiade (1976) présente le segment initial de la phrase comme un intitulé : « Le nez de Cléopâtre : » Reprendre cette ponctuation (probablement arbitraire) aurait ici écarté toute discussion.
  6. Ni-Lu-Hoa Nguyen., Les figures de style, Paris, Éditions Belin, 1992 in Ni-Lu-Hoa Narration graphique : l'ellipse comme figure et signe peircéen dans la bande dessinée, Montréal, Thèse Université de Montréal, , 348 p. (lire en ligne) page 27
  7. « Le nez de Cléopâtre a-t-il vraiment changé l’Histoire ? »
  8. « La physique met le nez dans la défaite de Cléopâtre », sur le monde.fr,
  9. Le Nez de Cléopâtre sur Fnac.com
  10. Gilbert Burki, Du nez de Cléopâtre à la rétine de Galilée : le fabuleux voyage d'un atome de carbone, (ISBN 979-10-203-4455-7, OCLC 1350430613, lire en ligne)
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